Comment organiser sa Direction des systèmes d’information ?

Comment organiser sa DSI ? - Abraxio

Quelle organisation pour une DSI efficace et pertinente ? Récemment, un article du magazine CIO Online* consacré au sujet indiquait avec beaucoup de justesse : « Rien n’est éternel dans l’informatique, y compris la structure organisationnelle de la DSI. »

Si l’organisation de la Direction des Systèmes d’information n’est pas gravée dans le marbre, le changement n’est pour autant pas une fin en soi, surtout qu’il n’est pas toujours bien vécu. Il est néanmoins un véritable acte de management, déclencheur d’une nouvelle dynamique. Alors comment organiser sa DSI ? Sur quels critères ? Quels paramètres prendre en compte ? Décryptages.

Comment structurer la DSI ?

Des organisations qui reflètent la représentation du rôle de l’IT

Bien souvent, on observe que l’organisation de la Direction des Systèmes d’Information est d’abord le reflet de la vision… du DSI, ou de la Direction générale dont il dépend. Logique, car ce qui sous-tend la structuration de la DSI, c’est de viser la performance opérationnelle et l’alignement permanent du SI avec la stratégie IT et celle de l’entreprise.

Ainsi, une DSI qui se voit comme fournisseur de prestations et services pour des clients internes (une position de moins en moins partagée) répondra généralement à une organisation assez classique centrée autour des grandes fonctions internes de la DSI :

  • une équipe de Production et d’exploitation chargée du Run sur le SI existant,
  • une équipe dite d’Études, chargée de concevoir et réaliser les projets de transformation IT qui vont le faire évoluer et en assurer la maintenance (TMA),
  • et enfin une équipe d’experts – PMO, chefs de projets, dans laquelle on viendra piocher des compétences, au gré des besoins.

Cette organisation met l’accent sur l’excellence opérationnelle, mais contribue plus difficilement à positionner la DSI comme créatrice de valeur.

La DSI qui entend se positionner comme partenaire des Métiers pourra privilégier une organisation « produit ». Favorisée par la culture DevOps, elle rapproche ainsi les équipes de la DSI avec les Product Owners (PO) au sein des Métiers. Contrairement à la structure traditionnelle, les métiers de conception, de build et de run ne sont plus aussi séparés que par le passé. Effet corollaire : certains métiers de la Direction informatique ont tendance à se spécialiser (architectes, PO, designers, développeurs…) et son organisation est en miroir de celle de l’entreprise dans son ensemble.

La DSI visionnaire aura tendance à s’organiser en embarquant le digital et l’innovation en son sein, le plus souvent avec une cellule dédiée qui rendra le sujet visible et garantira qu’il soit traité en tant que tel et ne passe pas derrière les urgences. Face aux nouvelles technologies et à l’accélération des nouveaux usages numériques, c’est un choix judicieux qui peut limiter le shadow IT en évitant que les directions métiers ne se saisissent directement de nouveautés que la DSI ne leur proposerait pas.

La DSI stratège, positionnée au plus près de la Direction générale, souvent clé dans le pilotage de la transformation. Elle occupe alors un rôle clé dans la création de valeur, avec une vraie reconnaissance de sa contribution à l’atteinte des ambitions stratégiques de l’entreprise, notamment en termes de business. Lorsque la place de la DSI est aussi cruciale dans l’organigramme, il n’est pas rare qu’elle intègre en son sein un périmètre plus large que les prérogatives « traditionnelles » de la DSI au sens strict. Selon la stratégie de l’entreprise, cela peut-être le pilotage de la Transformation, l’intégration des enjeux numériques, le pilotage des risques, le management de tous les projets, y compris ceux qui ne sont pas strictement informatiques… Dans ce contexte, il sera alors intéressant de matérialiser ce périmètre élargi également dans l’appellation de la DSI.

Pourquoi questionner l’organisation de la DSI ?

Définir ses objectifs en amont.

L’organisation idéale n’existe pas. Plusieurs facteurs peuvent conduire le Directeur des Systèmes d’Information à questionner et revoir sa structure :

  • En interne de la DSI, le besoin d’insuffler une nouvelle culture et/ou de remettre en dynamique le management et les équipes de la Direction. Des changements organisationnels peuvent ainsi contribuer à faire bouger les lignes et redistribuer les cartes. Dans un contexte de pénurie de talents IT, cela peut faciliter la fidélisation de certains collaborateurs grâce au projet porté par la DSI. Renouveler les équipes (internes comme externes) peut ainsi contribuer à lever des résistances au changement. Tous les 2-3 ans, ces changements peuvent être réellement bénéfiques.
  • Au niveau de l’entreprise :
    • une évolution significative de la stratégie : fusion ou opération de croissance externe, mouvement d’internationalisation, repositionnement stratégique de l’activité, etc. La DSI doit alors se mettre en ordre de marche pour répondre à ces enjeux et besoins, car son organisation doit être alignée sur la stratégie de l’entreprise.
    • des restrictions budgétaires ou, en tout cas, une pression à optimiser les coûts de fonctionnement
    • une attente forte d’ouverture et de transparence vis-à-vis des Métiers, avec une collaboration accrue par exemple.
  • Au niveau de l’écosystème, des mutations de l’environnement qui poussent le SI – et donc son organisation – à se remettre en question et évoluer : digitalisation des business models, nouvelles technologies et nouveaux usages, accélération des transformations, agilisation des processus…

Dans tous les cas, la mise en place d’une nouvelle organisation au sein de la Direction informatique est un acte de management fort qui va tout à la fois :

  • redonner une dynamique à l’équipe ;
  • être un vecteur de transformation qui permet de se requestionner sur le sens et la stratégie de la Direction, puisqu’elle en est le reflet ;
  • contribuer à l’image et à la valorisation de la DSI : une nouvelle organisation est aussi une opération de communication, qui montre de façon tangible que les choses bougent, que la DSI s’organise pour mieux adresser les enjeux de l’entreprise, etc.).

Pour toutes ces raisons, il est donc important de changer régulièrement d’organisation et de se placer dans cette posture de transformation. Une organisation réussie est une organisation vivante ; pour rester pertinente, elle doit rester en mouvement et en capacité d’intégrer de nouveaux paramètres. En cela, il est intéressant de concevoir la (ré)organisation de la DSI non comme un projet qui sera un jour achevé, mais bien comme un processus – certes plus ou moins soutenu à certaines périodes – de transformation permanente. Ce mouvement permanent est d’autant plus intéressant qu’en changeant une organisation, on capitalise sur les acquis du modèle précédent, on en garde les bénéfices et on enrichit ainsi les pratiques des collaborateurs de la DSI et de leurs interlocuteurs.

Quelles tendances dans l’organisation de la DSI ?

Si nombre de CIO et responsables informatiques s’engagent dans une refonte de l’organisation de leur Direction, c’est qu’elles s’inscrivent dans un mouvement de fond : digitalisation et montée en puissance du numérique, quête de vitesse, d’échanges accrus, d’intégration IT plus poussée… Ces évolutions renforcent le poids de la DSI et sa vocation et sa capacité à insuffler dans les entreprises une vision transversale avec une forte dimension stratégique, à impulser et être motrice d’innovations, et à animer ces changements.

Le schéma traditionnel d’organisation de la DSI semble donc avoir vécu. Il est ainsi frappant de voir à quel point la montée en puissance du cloud d’un côté, et de la démarche DevOps de l’autre, ont conduit beaucoup de CIO et Directeurs informatiques à repenser le fonctionnement de leur Direction, et plus encore, de leur relation avec les Métiers :

  • Avec les approches cloud et SaaS, de nombreuses tâches ont pu être externalisées, ce qui a permis à la DSI de se recentrer sur la qualité du service rendu au bénéfice des Métiers, plutôt que sur l’administration des infrastructures.
  • L’approche DevOps a également contribué à dégonfler la pression qui pesait sur la Production, avec une gestion des compétences qui s’est développée plutôt du côté des Études.
  • Chez ces derniers, on va désormais valoriser certes l’expertise informatique, mais tout autant, voire plus, la capacité à devenir des spécialistes des différents Métiers de l’entreprise (vente et distribution, back office gestion, DAF et RH, etc.), allant jusqu’à la capacité à se « brancher » sur l’organisation – et même l’organigramme de l’entreprise, dans une véritable logique de partenariat.

Ainsi, si la Direction informatique reste le noyau central, au fil du temps, on observe clairement une tendance (et un intérêt) à la convergence de différents pôles au sein de la DSI ; petit à petit, la DSI étend son rôle, son périmètre et rassemble sous sa houlette plusieurs fonctions technologiques. Une position d’autant plus légitime que l’IT est perçu comme crucial dans les entreprises, pour faciliter et accélérer l’agilisation des processus et des pratiques.

Cette évolution se traduit d’ailleurs jusque dans la sémantique : un temps concurrencées par l’émergence des Directions Digitales et Directions de l’Innovation, de plus en plus de Directions des Systèmes d’Information embrassent également désormais la Transformation ou l’Organisation.

Concrètement, il n’est donc pas rare que les DSI regroupent en leur sein une dizaine de pôles différents : pilotage et management de l’activité, transverse (PMO), études, experts (data,…), fonctions support (RH, contrôle de gestion, achats), production et infrastructure, relation avec les fournisseurs, assistance utilisateurs. En complément, la DSI pourra être amenée à piloter l’ensemble des PMO de l’entreprise plutôt que de laisser une direction AMOA (assistance à maitrise d’ouvrage) coexister à côté d’elle. Il sera fréquent également qu’elle intègre le RSSI (Responsable de la Sécurité du Système d’Information) dans ses effectifs.

Evidemment, ces différents schémas d’organisation ne sont pas les mêmes selon la taille de la DSI. Dans les « grosses structures », les marges de manœuvre sont plus larges.

Nos conseils pour réussir l’organisation de sa DSI

  1. Avoir une approche pragmatique de l’organisation. Gare à la tentation de répliquer le même modèle à toutes les composantes de la DSI. Une généralisation excessive peut conduire à une complexité inutile qui produirait l’effet inverse de ce qui était escompté. Il peut au contraire être pertinent de tester de nouveaux modes d’organisation d’abord sur certaines équipes de la DSI, certains métiers spécifiques, avec des collaborateurs culturellement moteurs de ce changement, et miser sur l’effet d’entrainement.
  2. S’adjoindre le regard d’un conseil extérieur. Nombre de changements organisationnels se font à l’issue du départ d’un DSI et avec l’aide d’un manager de transition. Il est en effet parfois plus facile de porter un regard extérieur sur une organisation pour en faire bouger les lignes. Si le DSI est en place et qu’il souhaite réorganiser sa propre équipe, un consultant ou cabinet en transformation peuvent l’accompagner dans cette mission de réorganisation et accompagner la mise en place des processus associés.
  3. Intégrer les Métiers et la Direction dans la réflexion : quelles sont leurs attentes, comment mieux travailler ensemble, etc. En plus d’être une condition indispensable à l’efficacité de la nouvelle organisation, être à l’écoute des parties prenantes est un signal d’ouverture fort qui va contribuer à travailler l’image et le marketing de la DSI.
  4. Accompagner tout changement : qu’il s’agisse d’un big bang organisationnel ou qu’elle se fasse dans la douceur, toute transition engendre inévitablement des résistances (au mieux), voire du stress et de l’incertitude. C’est parfaitement humain, car derrière tout organigramme, il n’y a rien d’autre que des femmes et des hommes qui se mettront d’autant plus en mouvement et donneront le meilleur d’eux-mêmes qu’ils auront partagé, compris et adhéré au sens de la nouvelle organisation, et que cette nouvelle direction leur offre de réelles perspectives. Faire preuve de transparence est évidemment clé dans ce contexte. Travailler en étroite concertation avec les RH pour embarquer les questions de maintien des compétences, de formation, de spécialisation, l’est tout autant.
  5. Anticiper les effets de bord d’une nouvelle organisation. Tout changement engendre, avant d’atteindre pleinement ses effets en termes d’efficience, une perte temporaire de productivité et d’efficacité, le temps pour chaque acteur de prendre ses marques et de s’approprier les nouveaux périmètres, processus, etc. Cela implique donc de prévoir un calendrier de transition réaliste, mais aussi d’intégrer cet impact dans le pilotage du portefeuille projets de la DSI.
  6. Communiquer sur l’organisation de la DSI, a fortiori si elle change. La Direction informatique a souvent été accusée d’opacité, et la technicité de ses différents métiers l’a sans doute accentué. On a donc tout intérêt à expliquer le nouveau schéma, à présenter les équipes, les interactions avec les autres composantes de l’organisation, et ce à toutes les parties prenantes de la DSI, d’autant plus si elles sont impactées par les changements d’organisation ou d’interlocuteurs : autres Directions de l’entreprise, partenaires et prestataires externes, etc.
  7. Envisager de changer l’appellation de la DSI, si la nouvelle organisation le justifie (DSIT, DSIN, etc.) C’est souvent l’opportunité de marquer le nouveau périmètre embrassé par la DSI, d’appuyer le changement en ouvrant une « nouvelle ère » et de montrer le sens.

*https://www.cio-online.com/actualites/lire-6-signaux-d-alerte-montrant-qu-il-est-temps-de-restructurer-la-dsi-14818.html

La DSI dans son écosystème. Cartographie des modèles d’organisation

Indépendamment de l’organisation de la DSI en différents services ou équipes, il existe plusieurs modèles d’interactions de la DSI avec les autres directions de l’entreprise, certains se combinant parfois. Ces modèles sont très souvent dépendants de la structure et de la taille du groupe :

  • Modèle centralisé : tous les SI sont dans les mains d’une DSI unique, qui assure le pilotage pour l’ensemble de l’entreprise ou de l’organisation, au besoin avec l’aide de correspondants locaux.
  • Modèle décentralisé : chaque entité de l’organisation (filiale, département) intègre sa DSI de façon autonome.
  • Modèle hybride : les fonctions les plus critiques sont gérées au niveau central, d’autres sont laissées à la main de chaque filiale ou entité.
  • Modèle matriciel : la DSI est étroitement maillée avec les différentes directions de l’entreprise, avec des collaborateurs dédiés pour chaque entité ; cette approche transversale et ouverte peut en revanche complexifier le fonctionnement et les process internes à la DSI puisque tout doit être géré en filière.
  • Modèle externalisé : le SI est sous-traité à une entreprise tierce détentrice d’une expertise; l’entreprise est recentrée sur son cœur de métier.
  • Modèle du GIE (groupement d’intérêt économique) : la DSI est une entité à part au sein de l’entreprise et refacture ses prestations aux différents départements ou filiales.

Encore une fois, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise organisation, chacune à ses avantages et inconvénients. Ainsi, si une organisation matricielle a le mérite de renforcer la proximité avec les utilisateurs, elle va à l’inverse demander plus d’efforts pour maintenir la fluidité des échanges au sein de la DSI.