DSI: Comment Gérer ses Fournisseurs IT ?

Abonnements, logiciels, matériels, services, prestations externes… Dans une DSI, les fournisseurs ne manquent pas et la dépense informatique pèse parfois lourd dans le budget de l’entreprise. La bonne gestion des fournisseurs et partenaires IT n’est pas simplement cruciale pour la maitrise du budget ; elle est également étroitement liée à la performance de la DSI dans son ensemble – qu’on parle de ses activités récurrentes comme de ses projets de build. Alors quelles bonnes pratiques pour optimiser le suivi des fournisseurs de la DSI ? Réponse en 10 points clés.
Gérer ses fournisseurs IT : une injonction croissante
Dans les Directions des systèmes d’information ou services informatiques, nombreux sont les facteurs qui contribuent à renforcer l’impératif d’une gestion saine et efficace des fournisseurs. On peut notamment évoquer :
- Sur un plan très macro, la transformation des business models induite par le numérique et le poids de l’innovation. Cette transformation amplifie le rôle à la fois stratégique et critique du SI et incite, pour suivre le rythme de ces évolutions rapides, à challenger voire renouveler les fournisseurs auxquels on fait appel, avec des cycles de décision également accélérés.
- D’un point de vue systémique, l’inflation du nombre de fournisseurs, accentué à la fois par :
- la tendance, observée dans de nombreuses organisations, d’externaliser tout ou partie du SI
- la « webisation » des applications ou progiciels, de plus en plus développés « as a as service », cf. la multiplication des offres IaaS, PaaS, SaaS, BPaaS, etc.
- le développement du shadow IT, poussé par les Métiers, qui démultiplie les opérateurs
- La pression des DAF et contrôleurs de gestion pour contrôler et optimiser les postes de dépense, ainsi que l’entremise croissante des directions achats et directions juridiques :
- a fortiori dans un contexte inflationniste qui accroit la pression sur les prix,
- favorisée par l’envolée des dépenses de cloud, avec des tarifications parfois complexes
- L’accentuation des préoccupations environnementales et l’émergence des concepts de Green IT et de sobriété numérique qui poussent les directions informatiques à regarder leurs fournisseurs sous un jour nouveau, et éventuellement à sourcer de nouveaux partenaires.
Autant de motifs qui incitent les DSI à porter une attention accrue à la gestion et au pilotage de leurs fournisseurs, qu’il s’agisse de sourcing, de (re)négociation de leurs tarifs, mais aussi de qualité des prestations ou services délivrés.
D’autant que les processus d’achats IT ont un coût, notamment humain, souvent accentué par la complexité des prises de décision. Dans son ouvrage «Les relations avec les fournisseurs IT en 40 questions », Philippe Rosé estime ainsi qu’en moyenne, 20 personnes sont mobilisées lors d’un achat IT (14 dans les PME, 27 dans les grandes entreprises), réparties à part égale entre la DSI et les Métiers, et ce sans compter les équipes côté fournisseurs.
À chaque étape (sélection, gestion de la relation, fin de la prestation), le suivi des fournisseurs de la DSI est donc clé et il est important de tout mettre en œuvre pour optimiser son pilotage.
10 conseils pour optimiser le pilotage des fournisseurs de la DSI
1/ Standardiser la base fournisseurs IT de son organisation dans un référentiel unique.
Constituer un catalogue de ressources – prestataires, logiciels, matériels, abonnements, etc. – n’est jamais superflu. L’exercice a le mérite de centraliser l’ensemble des fournisseurs ou partenaires IT auxquels on est susceptible de faire appel dans une organisation donnée. C’est d’autant plus utile lorsque le shadow IT est monnaie courante, avec pour conséquence de démultiplier et de morceler la base fournisseurs. Le catalogue de ressources est alors une façon de reprendre la main sur tous les prestataires et d’en constituer une vision 360°, et d’éviter les solutions redondantes ou non conformes en termes de gestion de risques, par exemple.
Pour ce faire, on peut par exemple se référer à la nomenclature du Cigref qui offre un cadre standardisé. Cette démarche, outre d’être utile au quotidien pour la DSI et ses usagers, sera vue d’un œil favorable par les Directions financières ou achats, car elle permet également d’obtenir une meilleure visibilité et donc un meilleur contrôle des dépenses, en facilitant par exemple les opérations de massification et de comparaison de coûts.
2/ Être à l’écoute pour sourcer régulièrement de nouveaux fournisseurs.
Parce que les technologies évoluent rapidement, que de nouveaux besoins ou attentes émergent, il est normal de remettre en cause et renouveler régulièrement les fournisseurs auxquels la Direction informatique peut faire appel. Sourcer et référencer de nouvelles compétences et solutions fait donc partie du rôle du DSI dans le cadre d’une bonne gestion de ses fournisseurs. Pour ce faire, il est intéressant de :
- Echanger régulièrement avec les Métiers, afin de bien comprendre leurs objectifs stratégiques et leurs exigences (et pouvoir le cas échéant les requalifier, car l’expertise revient à la DSI) ; les associer à la définition des critères de sélection voire au processus de sélection en tant que tel (Appel d’offres par exemple)
- S’intéresser aux recommandations et retours d’expérience de pairs (les clubs de DSI sont à ce titre généralement très pertinents)
- Ouvrir la base fournisseurs de la DSI à de nouveaux types de collaboration type startups (avec lesquelles on pourra par exemple mettre en place des POC et ne pas hésiter à assouplir le cadre habituel de contractualisation et les exigences requises, pour favoriser a mise en place de ces nouveaux partenaires
- Intégrer les politiques internes (achats, gestion des risques, etc) et réglementations en vigueur. Cela peut par exemple conduire à référencer ou labeliser des fournisseurs « Green », etc.
3/ Mesurer la performance des achats IT.
Le Cigref a ainsi établi un certain nombre de bonnes pratiques et indicateurs qui permettent d’évaluer, sous 4 angles différents, la qualité du processus d’achat IT :
1/ Performance économique :
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– Economies réalisées, réduction des Opex
– Qualité du prix obtenu (initial et futurs approvisionnements) – Mise en œuvre du vendor management (gestion de la relation fournisseur au-delà du prix et du contrat)
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2/ Qualité des procédures :
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– Stratégie d’achats déployée via des accords cadres
– Taux de couverture des contrats cadres en termes de périmètre géré – Qualité et respect des processus achats et conformité des contrats – Assistance dans l’expression du besoin – Conformité du marché au besoin exprimé – Respect des délais de passation des marchés – Qualité d’échange au sein du binôme acheteur prescripteur – Benchmarks
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3/ Relations avec les PME et l’innovation
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– Volume d’achat réalisé auprès de PME
– Part de marchés attribués aux PME – Gestion du risque de dépendance (technique ou financière)
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4/ Politique RSE
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– Suivi des indicateurs environnementaux intégrés dans les AO
– Critère social – Recyclage des matériels – Recours aux entreprises du secteur protégé
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* Source : Pilotage du SI et de la transformation digitale – Les tableaux de bord de la DSI (Christophe Legrenzi et Philippe Rosé)
4/ Centraliser et partager toutes les informations fournisseurs utiles à l’équipe.
Une gestion fournisseurs réussie doit être vivante et partagée. Rien de plus frustrant que de perdre du temps à chercher un contact clé, à vérifier un point de contrat, sans être certain en prime que l’information dont on dispose est la dernière à jour. Lorsque le référentiel fournisseurs est constitué, on veillera alors à ce qu’il soit partagé et facile d’accès. Chaque partie prenante, qu’il s’agisse d’un manager de la DSI, collaborateur, voire interlocuteur Métiers, doit avoir simplement et rapidement accès à cette base documentaire partagée : coordonnées des contacts commerciaux ou du support, documents de référence tels que contrats, SLA, engagements, mais aussi évaluation des fournisseurs avec appréciations sur les coûts, les délais, la qualité de la relation, les éventuelles alertes sur des défaillances, etc.
5/ Automatiser le suivi des contrats et échéances clés
Dans la relation avec un fournisseur – particulièrement dans une DSI – le cadre juridique compte. Les dates clés à surveiller sont nombreuses, et plus le volume de fournisseurs est important, plus il est essentiel de s’en remettre à des alertes et notifications automatisées pour ne pas prendre le risque de laisser passer une échéance essentielle : renouvellement ou dénonciation de contrat, pièce administrative à réclamer périodiquement, remises sur volume à échéances.
Ce management des échéances est aussi une façon d’anticiper suffisamment à l’avance – le cas échéant – la recherche de nouveaux fournisseurs, car on sait que la tâche peut être chronophage (entre la rédaction du cahier des charges, la conduite de l’appel d’offres, la formalisation juridique, la mise en place, etc.)
6/ Analyser les dépenses IT pour optimiser le budget de la DSI.
Combien coûtent à l’année tel ou tel fournisseur de la DSI ? Quels sont les plus gros postes de dépense ? Comment a évolué la facturation d’un prestataire donné le temps ? Où en sont les engagements par rapport au prévisionnel ?
Analyser finement ses dépenses IT est une des clés pour piloter efficacement la relation avec ses fournisseurs. Cela peut permettre de dégager des pistes d’optimisations, d’envisager des renégociations, de sensibiliser les collaborateurs de la DSI à tel ou tel point de la relation. Il est donc important de mettre en place des tableaux de bord pour monitorer la dépense IT (par catégorie de dépense, direction Métiers, etc), cela donne des clés de lecture pertinente pour piloter son « pool » de fournisseurs et la relation avec chacun d’entre eux.
7/ Mettre en place une gouvernance des fournisseurs
Il est pertinent de mettre en place un cadre de gouvernance pour instaurer et entretenir une relation solide avec les fournisseurs de la DSI. Cela passe notamment par le fait d’établir des points de contact clairs et de désigner un (ou plusieurs) responsable(s) de la relation fournisseurs, par exemple par domaines. On peut également planifier des réunions périodiques pour discuter des performances, des problèmes éventuels et des opportunités d’amélioration. Cette gouvernance – proche du vendor management – favorisera une communication ouverte et facilitera la résolution rapide des potentielles difficultés.
8/ Être vigilant sur la maitrise des risques.
Comme toute interface avec l’extérieur, la relation fournisseurs impose une vigilance particulière sur la maitrise des risque pour réduire les vulnérabilités et garantir la continuité des opérations de l’entreprise. L’enjeu est sans doute accru dans les DSI du fait du caractère souvent « névralgique » du système d’informations. Avant de démarrer la collaboration avec un nouveau fournisseurs, on veillera notamment à :
- Identifier et évaluer les risques potentiels: retards de livraison, pannes de service, sécurité des données, risques financiers.
- Constater l’existence de plans de continuité d’activité pour faire face aux interruptions potentielles des services fournis
- Etablir une conception rigoureuse des contrats : définir clairement les termes et conditions, obligations, responsabilités notamment en termes de sécurité des données, de confidentialité et de conformité réglementaire. Les contrats doivent également prévoir des mécanismes de résolution des litiges et de résiliation en cas de non-respect des engagements.
- Accorder une surveillance particulière sur la sécurité : notamment via des évaluations régulières, des audits et des tests de pénétration pour vérifier la conformité aux normes de sécurité établies.
9/ Établir des indicateurs de performance clés (KPI) et évaluer régulièrement les fournisseurs.
Il faut commencer par définir des KPI pertinents pour mesurer et évaluer la performance des fournisseurs IT. Cela peut inclure des critères tels que la qualité des livrables, le respect des délais, la réactivité du support technique, etc. On suivra régulièrement ces indicateurs pour identifier les éventuels écarts et prendre des mesures correctives. Périodiquement, il est également conseillé de réaliser des évaluations plus complètes des fournisseurs de la DSI pour mesurer leur performance globale. Ces évaluations peuvent être basées sur des questionnaires structurés, des entretiens ou des audits. Elles permettront d’identifier les points forts et les points faibles de chaque fournisseur, de mettre en évidence les domaines nécessitant des améliorations et d’initier des actions correctives si nécessaire.
10/ Partager en transparence, au sein de l’organisation et avec les fournisseurs :
Qu’il s’agisse du catalogue de ressources ou des tableaux de bords, il ne faut pas hésiter – au sein de l’organisation, à les partager, en toute transparence, avec les parties prenantes concernées : Métiers, Achats, DAF… Il y a beaucoup de choses à y gagner : c’est une façon de garder la main sur la base fournisseurs (on doit piocher là et pas ailleurs) , d’éclairer la dépense IT tout en valorisant la maitrise et l’attention portée au sujet, de sensibiliser certaines parties prenantes à des dérives dont elles n’ont pas forcément conscience, etc.
Cette transparence est également souhaitée dans le cadre de la saine relation de confiance à établir avec les fournisseurs de la DSI. On peut ainsi les encourager à partager des informations pertinentes sur leurs processus, leurs performances et leurs initiatives d’amélioration continue. Réciproquement, la DSI gagnera à partager ses objectifs et attentes de manière claire et ouverte. Cette transparence mutuelle favorisera une collaboration plus étroite et une meilleure compréhension des besoins de chaque partie. Elle permet de repositionner la relation « client-fournisseurs » dans une approche partenariale dans laquelle les 2 parties ont à gagner.
Si on les applique dans les DSI, ces 10 bonnes pratiques vont contribuer à une meilleure gestion des fournisseurs IT, favorisant du même coup des relations plus efficaces, une meilleure qualité de service et une optimisation des investissements donc du budget de la DSI. Chaque partie a d’ailleurs tout à gagner à construire durablement une relation gagnant-gagnant entre la DSI et ses fournisseurs, portée par un objectif commun : la création de valeur.
Que peut-on attendre d’une solution dédiée pour piloter ses fournisseurs et contrats ?
Compte tenu des enjeux, il est intéressant pour une DSI qui souhaite renforcer le pilotage de ses fournisseurs d’adopter un outil de gestion qui va faciliter et rendre plus efficace le suivi de ses dépenses et contrats. Une telle solution permet de centraliser les informations contractuelles, de surveiller les échéances, d’automatiser les rappels et de faciliter la gestion des renouvellements et modifications contractuelles.
- Faute d’équipement dédié, de nombreuses DSI pilotent leur base fournisseurs dans des tableurs Excel, avec les écueils que l’on connait à l’outil : manque de collaboration, d’automatisation, etc.
- À l’opposé, il existe sur le marché des solutions exclusivement dédiées au management des fournisseurs et contrats ; pour le coup, elles proposent parfois des fonctionnalités trop avancées pour l’usage qu’en font la plupart des DSI (et donc avec un coût non pertinent).
- Aussi, on regardera avec intérêt les solutions qui interfacent dans la même plateforme le référentiel des fournisseurs avec le pilotage budgétaire de la DSI, comme le fait Abraxio. Les deux dimensions étant étroitement liées, c’est une bonne façon de les manager sans « doublonner » le temps passé à suivre et mettre à jour les données de l’un ou l’autre, et notamment de facilement maitriser les engagements afin d’éviter toute dérive ou mauvaise surprise.
Focus
Comment évaluer ses fournisseurs ?
La pratique n’est pas encore systématisée ; il est pourtant clé de mettre en place une évaluation objective des fournisseurs, sur la base d’un scoring qui va favoriser une notation factuelle. En procédant ainsi, on limite ainsi tous les facteurs qui peuvent biaiser l’impression laissée par un fournisseur donné (tels que : organisation ou SI complexe, gouvernance déficiente, surestimation de la création de valeur apportée par une technologie donnée et difficultés d’intégration avec le legacy, mauvaise anticipation des dépendances, etc).
Qu’il s’agisse d’un éditeur de logiciel, d’une société de services, d’un intégrateur ou d’un cabinet de conseil, Christophe Legrenzi et Philippe Rosé proposent dans leur ouvrage Pilotage du SI et de la transformation digitale – Les tableaux de bord de la DSI (plusieurs critères d’appréciation pour évaluer les fournisseurs, avec un séquençage intéressant en 3 phases :
Avant | Pendant | Après |
– Clarté de la roadmap technologique
– Niveau de pression commerciale – Niveau de compétence des commerciaux – Qualité de l’obligation de conseil – Turn-over des commerciaux – Compréhension des besoins métier – Qualité réponse AO – Clarté des conditions tarifaires – Clarté et possibilité de (re)négociation des conditions contractuelles, tarifaires – Formalisation du partage des rôles et responsabilités – Visibilité / image |
– Facilité de mise en œuvre / déploiement de la solution (y compris en adaptation si évolution des besoins)
– Performance de la solution par rapport aux attentes – Niveau de compétences des consultants et stabilité des équipes projet – Qualité de l’accompagnement pour l’intégration, du transfert de compétences et/ou connaissances – Qualité de la documentation – Qualité de la formation proposée – Respect des délais, des engagements de services et réactivité – Contrôle et traçabilité des livrables |
– Rapport qualité prix global de la solution ou prestation
– Niveau global de satisfaction des utilisateurs – Réactivité du support et de prise en charge des incidents – Niveau de dépendance par rapport à la solution – Niveau des coûts de maintenance – Stratégie de versioning – Niveau de pression commerciale – Respect des engagements contractuels |